
95 % des dirigeants marketing pensent que l’IA (générative, agentique) va bouleverser leur métier. Et ce n’est pas le seul facteur de bouleversement. A cela s’ajoutent l’arrivée dans la vie active des nouvelles générations, la forte pression sur la productivité, l’agilité business via les outils low-code, les approches data & performance-driven… La grande vague de destruction créatrice énoncée par Joseph Schumpeter est en route – mouvement selon lequel de nouvelles innovations viennent rendre les activités et métiers existants obsolètes – avec un nouveau terrain d’exploration quasi infini pour les marketeurs. Etes-vous prêt à suivre ?
Les cibles : les consommateurs, en particulier la Génération Z, évoluent rapidement. Rappelons-le, la Gen Z va avoir 30 ans, influence ses parents, bouscule les marques et redéfinit la consommation au sens large. C’est une cohorte qui pèse et qu’il faut savoir décrypter : ils apparaissent souvent paradoxaux et liquides (hyperconnectés mais solitaires, soucieux du monde mais dans l’instant, adoptant des comportements responsables mais succombant à la fast-fashion…). Ils ne peuvent plus être « mis dans les cases traditionnelles » du marketing et cela rend la tâche des marketeurs de plus en plus complexe.
Les lieux d’interaction client : les sphères digitales se multiplient et se fragmentent. Les médias payants ne sont plus la panacée (coûteux et bruyants). Les médias propriétaires sont souvent encore peu exploités. Les cartes sont rebattues : 64% des Gen Z ont déjà utilisé Tik Tok comme moteur de recherche et 10% se fient uniquement à Chat GPT. D’ailleurs, ces recherches conversationnelles vont peu à peu supplanter les moteurs traditionnels (Gartner estime ce chiffre à 25% pour 2026).
Les produits / services : l’évolution des attentes expérientielles autour des produits / services digitaux, de poche, et même parfois invisibles, ré-ouvre le terrain du design, dont le « tout conversationnel ». Dans les services financiers, l’exemple du Buy Now Pay Later ces dernières années, ou du virement Account 2 Account ont permis à des acteurs très récents d’intermédier et mettre en danger les banques traditionnelles.
La promotion : la vieille recette basée sur le lien ou la personne de confiance fonctionne toujours, cependant les réseaux d’influence qui déclenchent les achats changent. La notion de fidélité doit équilibrer le transactionnel (attractif mais souvent destructeur de valeur) et de l’émotionnel : de l’expérientiel, de membre à créateur (e.g. la majorité du chiffre d’affaires de Glossier provient de l’UGC – User Generated Content), de client à designer (e.g. Monzo a repris le principe de My Starbucks Idea qui avait fait émerger le paiement mobile, le wifi gratuit, et tout une variété de nouveaux produits/variantes), du communautaire (Nike), etc.
Les méthodes de travail : les organisations marketing doivent également se mettre à la vitesse des nouvelles technologies et devenir plus agiles pour rester compétitives. Plusieurs concepts et principes sont redéfinis, comme les content factories AI relocalisées, l’orchestration personnalisée de l’expérience, les simulations synthétiques, le SEO/GEO etc. Les squads métiers agiles doivent réduire significativement les durées de cycle (e.g. tester la performance d’un contenu dès sa création) et faire du cousu main à l’échelle (e.g. les CDP – Customer Data Platform – permettent au marketeur d’ajuster en quelques minutes la Next Best Experience en réponse à un comportement individuel spécifique).
Ce bouleversement est un défi. Mais surtout une opportunité majeure. De nouvelles pratiques, associées à la bonne maîtrise de nouvelles technologies comme l’IA générative ouvrent des possibilités inédites et quasi infinies en impactant la top line et la bottom line.
1 – La top line, en intensifiant les contacts clients (ou prospects), la pertinence, la personnalisation de masse via le « tout conversationnel » (ou conversational everywhere). Par exemple, certains acteurs de premier rang (outre Facebook) adaptent automatiquement le ton d’un message et le type d’argument selon l’individu ciblé en utilisant le modèle psychologique OCEAN – qui mesure les 5 traits de personnalité : ouverture, conscience, extraversion, agréabilité et névrosisme. D’ici quelques temps, nous pourrons nous projeter dans un futur où le développement de la top line repose sur du A2A (Agent to Agent) : les agents Marketeurs IA de l’entreprise (agent de ciblage, de contenu, de sollicitation… ) parleront à l’agent IA du client : cet agent orchestrera l’ensemble des interactions du client avec les marques, achètera à sa place (cf. « Agents buy for me », ou l’« Agentic commerce framework » d’OpenAI publiée il y a peu côté vendeur), et à terme deviendra un véritable curateur du style de vie du client.
2 – La bottom line, en réduisant significativement les coûts marginaux. Par exemple, les marketeurs peuvent désormais produire des articles de blog, des posts, des podcasts audios, ou des vidéos en quelques minutes, et adaptés à un contexte individuel. Ils peuvent également simuler les impacts des opérations marketing bien en amont et à moindre coût avec des utilisateurs synthétiques (synthetic users) – sans problème de confidentialité.
Je n’ai jamais vu en Marketing Digital un modèle plus performant qu’un modèle anthropomorphique, imitant les comportements humains. Est-ce bon signe ? Ce modèle permet, embrassant l’ensemble des canaux (conversationnels), d’écouter (tags, pixels, chatbot intelligent, Customer Data Platform, etc.), de « réfléchir » (modèle NBA, analyse de sentiment, modèle de requête LLM…), puis de répondre ou de passer à l’action (génération de contenu, outil de personnalisation, activation, outil de triggers/déclencheurs, IA agentique…). Plus généralement, c’est un modèle qui repose sur le dialogue marketing. Sans dialogue, pas de connaissance. Sans connaissance, pas de pertinence. Et la pertinence ouvre au potentiel de croissance. Les possibilités offertes par l’AI générative à ce « tout conversationnel » permettent d’exploiter cette chaîne apprenante, et d’ouvrir ainsi les possibilités d’expansion business pour des coûts marginaux significativement réduits en maximisant les opérations de re-targeting, les plus performantes par construction.
Encore faut-il savoir instaurer ce dialogue Marketing de manière humaine dans un monde de robots, de manière émotionnelle dans un mode automatisé, de manière spontanée dans un monde très programmatique, de manière authentique dans un monde de communications intéressées, etc.
Quelle gageure pour le marketeur de demain !
Le marketeur X.0 doit donc savoir créer des dialogues apprenants, rendre certains services pendant le dialogue afin de maintenir la tension dans la discussion, en cycle très courts et agiles, de manière plus responsabilisée (plus autonome dans l’organisation), tout en exploitant la largeur technologique de sa nouvelle boîte à outils pour expérimenter / exécuter / piloter, tout en restant empathique et humain.
Il doit tout être à la fois :
D’un côté il est l’acteur d’un laboratoire technologique de création d’expérience, et de simulation via des individus synthétiques (IA) basé sur la connaissance historique client. Son rôle n’est plus de définir des expériences, mais d’en être l’influenceur créatif et le curateur. Il définit le positionnement de la marque, l‘expérience de marque et les interactions avec les designers et les créatifs, multi-modaux (storytelling/copywriting, expérience visuelle) et souvent communautaires (User Generated Content).
De l’autre, il est le chef d’orchestre de la mise en œuvre réelle de ces expériences issues de son laboratoire, re-produite par l’IA générative et orchestrée par les agents IA, et en supervise les analyses et optimisations IA. Il est aussi le garant de la juste présence humaine sur les surfaces de contacts client, ainsi que dans la supervision des routines IA. Par ailleurs, avec le concept d’utilisateurs mentionné plus haut (vs prospect et client), les frontières entre les conseillers, marketeurs et les commerciaux s’estompent. De même, pour que l’expérience client soit facile et fluide, il est nécessaire (et c’est souvent négligé) que l’expérience collaborateur le soit. Le marketeur X.0 évolue donc dans des équipes pluridisciplinaires (IT, Data, Compliance, Métier, Marketing, Service, Communication, …) où la hiérarchie sert davantage d’accompagnement RH que de chaîne de commandement.
Le plus important reste : le besoin des consommateurs en valeur perçue et reçue, un équilibre juste entre connexion humaine ou robotisée, et des moments expérientiels qualitatifs. Cependant la valeur du marketeur X.0 n’est plus tant dans la bonne exécution des process (de la stratégie aux opérations) mais plutôt dans la définition, modélisation et la curation du dialogue (individuel). Un terrain de jeu quasi infini s’ouvre dorénavant à lui. Pour l’exploiter, le Marketeur X.0 doit être agile, performant, IA-phile et créatif.
Adopter ces pratiques, expérimenter, personnaliser et industrialiser lui permettront de contribuer au développement business tout en réduisant significativement ses coûts.
Comme Aristote le rappelait avec le concept d’Ergon (travail, œuvre, action), c’est par l’accomplissement de notre travail, guidé par la raison et la vertu, que nous pouvons nous révéler réellement humain. À nous de transformer l’expérience grâce à la technologie et aux données, tout en nous révélant profondément humain.
Note : nous parlons dans cet article de consommateurs et de comportements liquides. Découvrez notre étude complète sur l’évolution des comportements de consommation.

Pierre conseille les CDO et CMO de groupes internationaux et de leurs filiales sur l’eXpérience, le Marketing, le eCommerce, et la connaissance client, grâce à ses presque 20 ans d’expérience. Il est très enthousiaste quant à l’apport de la valeur en entreprise par la transformation. Il est passionné par les apports de la technologie à l’humanité, en particulier dans la période actuelle particulièrement riche en disruptions, dont la démocratisation de l’IA via l’IA générative.

Julien rejoint Capgemini Invent en 2009. D’abord spécialisé dans la stratégie digitale tous secteurs d’activité, il a piloté nos offres autour des plateformes de services et de l’innovation. Il a ensuite combiné nos expertises de conseil, créa & design, customer data et marketing tech pour créer de nouveaux business models et transformer l’expérience client de bout en bout, notamment dans les services financiers.
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