Le futur de l’expérience client sera sensible ou ne sera pas

Dans l’univers de l’IA, les réussites techniques ne cessent d’abonder. Toutefois, pour se différencier, une marque ne doit pas définir son expérience client en se basant uniquement sur la technologie, mais elle doit aussi miser sur la sensibilité.
Elisabeth Jamot et Stéphane Sun

Le corps comme interface 

Téléphones intelligents, montres et bracelets connectés, demain les neurotechnologies… Devant l’intimité grandissante du corps et de la technologie, le consommateur devient « un nouveau cyborg » et la relation client prend de nouvelles dimensions. Le corps devient donc une interface : c’est sur sa cuisse qu’on sent le téléphone vibrer, c’est la notification qui interrompt le podcast qu’on écoute, c’est la montre connectée qui nous informe de notre santé…

My phone is quite literally
an extra appendage
It is glued to my palm
Stitched to my hip…”

Technically Blended Body, Shanelle Gabriel

 

On n’interagit plus avec le consommateur dans un espace tiers, mais directement dans sa zone d’intimité, tout proche, trop proche, au risque d’être intrusif.

La marque doit dès lors définir son expérience client en allant au-delà de la technologie. Elle doit miser sur la sensibilité, c’est-à-dire être attentif aux affects de l’humain augmenté.

Trois types d’intelligences guident cette métamorphose : d’abord, l’intelligence du langage et la nécessité du langage multimodal ; ensuite, l’intelligence contextuelle pour mieux comprendre l’utilisateur ; enfin, l’intelligence émotionnelle, avec la voix comme vecteur d’émotion et de transformation.

 

  1. L’intelligence du langage : parler multimodal

Autrefois, nos modes d’échange avec la technologie étaient marqués par des interactions distinctes : nous parlions à notre téléphone, nous regardions la télévision, nous écrivions sur notre ordinateur.

Cela dit, ces frontières s’effacent du fait de la multimodalité permise par les derniers progrès scientifiques : maintenant, nous écrivons sur notre téléphone qui ne sonne plus, nous parlons à nos écrans et plus souvent à Siri qu’à maman, et demain nous ferons fonctionner notre ordinateur en le regardant.

Au-delà des dispositifs, notre langage lui-même se transforme. Dans une même conversation, nous ne nous exprimons plus seulement avec du texte, mais aussi avec des vidéos, des GIFs, des émojis, des mèmes… formant ainsi un espace pour une sémiotique nouvelle.

Cette intelligence du langage constitue un véritable défi pour les marques, qui doivent s’adapter à ces nouvelles formes d’interactions. Les outils d’IA générative, tels que ceux développés par OpenAI, sont déjà capables de comprendre et de répondre à plusieurs registres, formats et codes, ouvrant la voie à des interactions plus fluides et naturelles.

 

  1. L’intelligence contextuelle : saisir le contexte utilisateur

Les marques peuvent douter de l’exactitude de ces agents conversationnels, ce qui constitue un frein à leur adoption. Il est toutefois possible de les associer à des données spécifiques à l’entreprise, pour créer des interactions fiables et cohérentes avec l’identité de marque. Cela est rendu possible grâce à la « Retrieval Augmented Generation » (RAG), une technique qui permet à l’IA générative d’interroger une base de données rassemblant des connaissances, avant de fournir une réponse.

Cette prise en compte du contexte favorise une relation de confiance, plus adaptée à la sensibilité du client. Elle est donc à même de renforcer sa préférence et sa fidélité pour la marque.

Mais l’intelligence contextuelle va encore plus loin.

Il s’agit également de bien organiser la base de connaissances qui alimente les RAGs, pour qu’elle reflète les besoins de l’utilisateur et non ceux propres à une étude de marché. En d’autres termes, il s’agit d’être data-centric – soit le soin à apporter aux données pour qu’elles reflètent au plus près la voix du consommateur – plutôt que d’être data-driven.

 

  1. L’intelligence émotionnelle : la voix comme vecteur d’émotion et de transformation

L’IA a atteint un tel niveau d’hyperréalisme que des interactions que nous pensions dignes du film Her sont aujourd’hui réelles. L’un des derniers assistants virtuels dévoilés par OpenAI semble flirter avec l’utilisateur, démontrant sa capacité à imiter des comportements humains complexes. Lors d’une autre démonstration, l’IA reprend son souffle en comptant rapidement, simulant parfaitement un aspect physiologique.


Réactions à la scène de “flirt” de Chat GPT-4o

Être en phase avec cette forme d’intelligence émotionnelle permet d’envisager de nouveaux territoires d’incarnation pour les marques. Grâce aux avancées de la technologie vocale, une entreprise peut se doter d’une voix virtuelle et rendre sa personnalité tangible. Ainsi, on peut imaginer que cette voix devienne, demain, un point d’interfaçage direct avec l’entreprise, que l’on puisse converser avec elle pour avoir des renseignements, suivre ses commandes, faire un achat…

Contrairement aux humains, l’IA est capable de traiter un grand nombre de scripts simultanément, de s’adapter émotionnellement à chaque client et même de réduire, dans une certaine mesure, les biais qui nous sont propres. Dans l’absolu, l’IA ne fait pas de distinction en fonction de l’accent ou des différences culturelles. Elle se concentre uniquement sur le sens des mots.

 

C’est pourquoi aujourd’hui, si elle est consciencieusement entraînée, l’IA est potentiellement un outil puissant pour une relation client plus ouverte, plus inclusive, et sans jugement.

Les auteurs
Elisabeth Jamot
VP - Brand and Creative
Elisabeth Jamot
Elisabeth Jamot
VP - Brand and Creative

Elisabeth a passé la majorité de sa carrière dans des agences créatives en Europe et Amérique du Nord. Ses expertises de prédilection sont l’insight consommateur, le branding et développement de la marque, la stratégie commerciale créative et le storytelling, dont elle a fait bénéficier de nombreuses grandes marques issues de secteurs variés.

Elle rejoint frog en 2024 en tant que VP Brand and Creative, pour apporter sa vision et son expertise transverse aux projets d’innovation, de design et d’expérience que nous réalisons chez frog.

Stéphane Sun
VP - Data-driven Customer Experience
Stéphane Sun
Stéphane Sun
VP - Data-driven Customer Experience

Stéphane a passé plus de quinze ans à mener des projets d’innovation, pour penser et façonner l’expérience client au rythme des disruptions technologiques. Il porte les offres d’IA générative appliquée à l’expérience client pour frog et Capgemini Invent et s’emploie à déployer avec succès ces nouveaux leviers de transformation et de croissance.

Enregistré avec succès!